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Notre auteur était profondément pénétré des idées de son temps, bien que, vu le caractère et le genre de son œuvre, elles ne soient pas exposées dans un système logiquement développé. Pourtant on peut percevoir ses idées socio-politiques au travers de pensées, remarques et épithétes isolées.
Ainsi reproduit-il exactement le schéma de l'organisation sociale en trois classes, caractéristique du Moyen Âge: guerriers, orants et laborants. De plus, citant ces trois niveaux sociaux, il met à la première place les guerriers, la noblesse:
Une telle logique selon laquelle la noblesse est plus haute que les autres classes et surtout que le clergé, puisqu'elle défend le peuple entier les armes à la main, était à cette époque propre aux œuvres des laïcs, des chevaliers, tandis que le clergé défendait la priorité de sa classe. Mais notre auteur, on peut le supposer, était plus attaché aux œuvres des écrivains de chevalerie.
Son interprétation des bases de l'organisation sociale est excessivement naturaliste: elles sont prédéterminées par la nature et la raison en tant que principaux biens naturels de l'homme. Il écrit à ce propos:
Recourant à cette allégorie de la raison, habituellement représentée sous les traits d'une noble dame, il généralise par là-même l'idée de raison, en y voyant l'intendant universel, qui gère le droit naturel ou la loi de nature. Cette loi est pour partie le droit de chaque condition sociale et de chaque homme, selon lequel chacun doit vivre et s'occuper de la tâche qui lui est fixée.
Ses idées politiques sont également traditionnelles, surtout sa conception des obligations du souverain. Ainsi écrit-il à propos du roi René:
Le souverain idéal est celui qui soutient le bien de la société en assurant la justice et en maintenant l'ordre naturel et raisonnable.
Cependant, les idées socio-politiques et les réminiscences historiques ne sont que des éléments disséminés dans un texte poétique, inspiré par l'idéal courtois et chevaleresque. Son auteur est typiquement le clerc français qui renonce sans problème aux graves pensées sur la mort et sur Dieu pour les vivantes formes qui le ravissent de la culture courtoise et chevaleresque. Une seule fois il se livre à une réflexion sur la mort (str. 20), après quoi dit-il:
Et qu'estime-t-il le plus? Posant la question: «Ou est plus riche le trésor!» (str. 21), il répond:
Ce qui nous donne envie de tenter une supposition sur l'âge de notre auteur. Vraisemblablement, il est jeune. Plus mûr, il aurait montré plus de prudence dans ses jugements, surtout étant moine.
Toute son œuvre est pénétrée de l'esprit courtois; et sous ce rapport il traduit fidèlement l'atmosphère des fêtes de Saumur. C'est en cela d'ailleurs que se distinguent tous les tournois et joutes du Moyen Âge. Mais les compétitions organisées par le roi René se signalent par un rituel courtois extrêmement élaboré. La joute de Saumur «entreprins fut pour une dame, au gré d'amours», (str. 2). L'auteur ne cite pas son nom et se contente de remarquer: «sus mon âme on ne saurait plus belle eslire». (str. 2). On a émis la supposition qu'il s'agissait de Jeanne de Laval, que le roi René épousa plus tard, après la mort d'Isabelle de Lorraine. Mais elle n'était pas présente aux fêtes, aussi G. Bianciotto at-il raison de remarquer à propos de cette dame qu'ici «la fiction amoureuse est présente et en aucune façon voilée».
Les participants, écrit l'auteur au début de son poème, étaient:
Le symbole de la joute était «la nouvelle fleur», que l'on commençait depuis peu de temps à cultiver «l'a pensée». L'écu, qui avait été hissé sur la colonne de marbre, était couvert de ces fleurs, ainsi que les caparaçons des chevaux et les écus des «tenants» commandés par le roi. Ainsi le roi René avait-il renouvelé l'esprit de la compétition. Il marchait avec ses chevaliers en qualité non pas de défenseur du «pas» comme c'était l'habitude dans l'organisation d'un «pas d'armes», mais de défenseur de la fleur qui, on peut le supposer, était un symbole de l'amour.
Bien que notre auteur ne connût, parmi la multitude de dames qui s'étaient rassemblées là, que la seule dame de Beauvau, il parle avec enthousiasme de toutes celles qui se rassemblèrent dans le château où règne «vraie amour», il leur attribue toutes les qualités possibles et pathétiquement s'écrie en conclusion: