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Votre Parrot
212. G. F. Parrot à Alexandre IER
Dorpat, 10 janvier 1825
Sire!
Je pars pour Pétersbourg, où j’arriverai en même temps que ces lignes. Je viens Vous offrir mon travail, espérant que Vous ne refuserez pas de le voir et son auteur, et de lui accorder par là sa plus douce récompense. Je vais à Pétersbourg, encore pour hâter par ma présence la résolution définitive. Car il n’y a pas de temps à perdre si les travaux doivent commencer avec le printemps. Outre les raisons de ne pas différer ces travaux que j’alléguai dans ma dernière lettre, il en est encore une, dont la première idée m’a fait frissonner. Supposez, Sire, que pendant une inondation et un ouragan, semblable à celui du 7 Nov., il éclate un incendie. Que deviendront Pétersbourg et ses habitants? Je ne veux pas peindre cette scène horrible. Mais elle est possible!
<Dieu Vous préserve de ce malheur.>
Je travaille à la dernière page de mon plan.
Votre Parrot
Ces lignes étaient déjà écrites lorsque je reçus un papier officiel de mon Ministre, par ordre de Sa Majesté Impériale, dont le contenu est que «comme l’on a déjà présenté beaucoup de projets semblables, Vous présentiez aussi le Vôtre au comité des routes de S. A. I. le Prince de Würtemberg»1.
Supprimerai-je ma lettre? – Non. J’ose Vous laisser lire dans mon cœur. Vous n’y verrez, Sire, autre chose que la persévérance, l’espérance, un attachement à Votre Personne chérie que rien ne peut vaincre.
Vous voyez les Architectes qui Vous présentent les plans d’un bâtiment ordinaire, et me renvoyez à un comité qui se plaira à traiter en écolier (comme cela a déjà eu lieu deux fois, dans l’affaire des corniches et dans celle des casernes2) un homme de mon âge, un homme de lettres dont <la célébrité> le nom n’est inconnu dans aucun pays de l’Europe. <L’honneur de l’instruction publique est intéressé à ce que l’on ne me traite pas ainsi.>
Je ne crains pas, Sire, les <examens> discussions scientifiques; au contraire j’avais espéré que Vous confieriez l’idée générale d’abriter Votre capitale contre les inondations, et de l’orner par des travaux hydrotechniques qui lui manquent dès sa naissance, à un comité extraordinaire composé des hommes les plus éclairés de l’Amirauté, du département des routes et du Corps du génie. J’espérais qu’après avoir pris Vous-même une idée générale de mon plan, Vous me renvoyeriez à ce comité pour le discuter avec lui. Car c’est en vain, Sire, que l’on croirait avoir saisi un plan de cette étendue par la description, qui, quoique plus volumineuse que je n’avais vue, ne contient pas quantité de renseignements et de calculs qui, s’ils y étaient admis, feraient de ce mémoire un livre entier, sans compter la réfutation des objections que l’on pourrait faire.
Si Vous avez, Sire, quelque prévention contre moi, que j’ose croire n’avoir pas méritée, jetez seulement un coup d’œil sur mes plans et Vous sentirez que ce travail étendu mérite qu’elle soit oubliée pour un instant. <Vous savez d’ailleurs que je ne suis pas sans connaissance de cette partie. J’ai vu et étudié>
Je logerai chez l’académicien Krug, au bâtiment de l’Académie à Wasiliostrow. Daignez m’y envoyer Vos ordres.
213. G. F. Parrot à Alexandre IER
Saint-Pétersbourg, 12 janvier 1825
Sire!
J’ai accompli Vos volontés. J’ai présenté mon mémoire et mes dessins au Duc Alexandre de Würtemberg, qui les a examinés avec beaucoup de soin pendant mon séance de 4 heures. Ce n’est pas à moi à répéter tout ce qu’il m’a dit de flatteur à cet égard; il a sûrement déjà fait son rapport à V. M.
Mais j’ai une grâce à Vous demander, Sire! la seule récompense pour ce travail, pour mon voyage, pour mon zèle. Je n’aspire d’ailleurs à rien et je Vous prie de prendre ce mot au pied de la lettre. Je n’aspire qu’au bonheur de Vous voir encore une fois dans ma vie. Voudrez-Vous me refuser cette dernière heure? Votre cœur résistera-t-il à cette prière? Pourrez-Vous être cruel <et injuste> envers Votre Parrot, que Vous avez si souvent pressé sur Votre cœur? Je ne veux que Vous voir. Je veux savoir où j’en suis avec Vous; je veux le savoir de Votre bouche. J’ai le droit de le demander parce que je Vous ai aimé, parce que Vous m’avez aimé. Je Vous plains, oui je Vous plains et ne voudrais pas être à Votre place, si Vous nommez ce sentiment romanesque. Ne méprisez pas Votre jeunesse, que la Russie et l’Europe entière regrettent; ne méprisez pas mon sentiment toujours jeune, et mûri et renforcé par la raison, l’expérience et l’âge même. Ne combattez pas Votre nature divine. Le moment où tout <ce qui est à Vous aujourd’hui>, Votre cour, Votre armée, Votre Empire et l’astuce des puissances, se résoudra à Vos yeux dans le brouillard qui sépare le temps de l’éternité, ce moment Vous rappellera Votre Parrot. – Faites que ce souvenir Vous soit consolant et cher.
Je Vous demanderai encore la faveur de voir l’Impératrice pour la dernière fois. Pour la dernière fois je veux renouveler dans mon cœur l’image de cet Être rare que le Ciel Vous a donné. Vous m’avez présenté à Elle la première fois. Finissez avec moi comme Vous avez