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Mais ce n’est pas tout, Sire! Vous voyez aisément que par ce procédé l’Angleterre fait valoir ses bons offices près de la Porte. Les choses, lui dira-t-on, en sont venues au point qu’il lui est impossible de subjuguer les Grecs et qu’elle doit absolument faire un sacrifice, que le moindre est celui des isles, d’autant plus que les Turcs ne sont pas marins et que leur vrai intérêt est se consolider sur le continent. Voilà donc l’Angleterre l’amie de la Turquie, et qui comme telle aura les clefs des Dardanelles et du Bosphore de Constantinople. Maître des isles, où il entretiendra une flotte considérable, l’Anglais saura soutenir cette amitié par la crainte et il est à prévoir que bientôt il sera possesseur des Dardanelles et de Scutari, comme il l’est de Gibraltar. Dès ce moment le commerce de la Russie dans la mer Noire est nul. Le peuple de marchands saura s’établir sur la côte méridionale, chez ses amis <les Turcs>, et coupera à la Russie tout commerce avec la Turquie et la Perse.
Si par contre Vous adoptez le plan que je Vous ai développé dans ma lettre sur la Grèce, si Vous faites de ce beau pays un État fort et stable qui puisse faire tête à l’Angleterre, Vous déjouez toutes ces manœuvres. Maître de Constantinople et d’un côté du détroit de Gallipoli[706], Vous ne laisserez passer dans la mer Noire que qui Vous voudrez, et Vos sujets feront tout le commerce de transit pour les marchandises étrangères et auront des débouchés sûrs pour leurs propres denrées. Vous aurez un pays superbe, supérieur pour le climat à tout ce qu’offre le sud de l’Europe; la vigne y fournira les vins les plus exquis, qui remplaceront ceux de France, de Portugal et d’Espagne, et cette branche de commerce deviendra même active pour la Russie, de passive qu’elle est aujourd’hui. L’oranger, le citronnier, l’olivier, le mûrier qui nourrit le ver à soie croîtront sous Votre sceptre et fourniront de leurs fruits tous Vos sujets. La Méditerranée offrira deux compétiteurs, la Grèce et l’Angleterre, pour vendre et acheter et le Russe vendra par conséquent à un plus haut prix et achètera à un moindre. Enfin Vous aurez la satisfaction d’avoir, dans Vos principes, établi un royaume et non un amas de républiques turbulentes.
<L’hiver, qui est venu enfin et durera encore longtemps, Vous favorise.> Il est temps encore. Négociez sur la Grèce. Résistez à l’établissement de républiques, pour gagner du temps pour Vos préparatifs, et que le milieu d’avril voie Vos armées sur le territoire turc avant que l’on ait soupçonné Votre projet. Quant au Manifeste qui annoncera Votre volonté à l’Europe, si Vous voulez Vous servir de ma plume, je Vous jure, Sire, que Vous serez servi. Je ne crains pas les plumes soldées de l’Angleterre ou de la France (l’intérêt les fait aller, le cœur guidera la mienne), et toute l’Europe pensante sera pour Vous. Il existe encore une voix publique. <On Vous a engagé à la fronder.> À présent elle sera à Vous, parce que Votre démarche sera morale et politique.
Nul mortel n’a et n’aura connaissance de cette lettre et de la précédente sur les Grecs. Mais Vous avez été dur envers moi et contre Vous-même en refusant de me voir. Une heure d’entretien eût plus éclairci la chose que dix lettres. Puis-je prévoir Vos objections? Je me livre tout entier avec une confiance sans bornes et Vous, Vous planez dans les vues. Au reste ce n’est pas de moi qu’il est question. C’est de Vous, de Vous seul. Vous deviez Vous ériger un moment de gloire qui eût affronté tous les siècles.
Adieu, ennemi chéri de Vous-même!
Toujours, toujours Votre Parrot
<J’aurais pu Vous écrire cette lettre et toutes les autres d’un style différent. Le mécanisme des formes a-t-il quelque chose de difficile? Mais je ne serais pas moi. J’abhorre l’ombre même de l’hypocrisie. Je puis avoir de la finesse; mais ce n’est que contre Vos ennemis.>
219. G. F. Parrot à Alexandre IER
[Dorpat], 20 septembre 1825
Sire!
Je sais que je risque Vos bonnes grâces en Vous offrant pour la troisième fois un sujet qui peut-être Vous a déplu la première. Mais je m’en tiens tout simplement au principe invariable que je me suis fait de Vous avertir de tout ce qui peut Vous toucher. L’attachement ne calcule pas. Daignez lire l’extrait suivant.
Extrait du Correspondant impartial de Hambourg 1
1823 – № 149 – 17 Septb
Paris 10 Septembre
«Des lettres authentiques de Napoli di Romania, du 1er Août – dit le Courrier français2, – annoncent que ce même jour le gouvernement provisoire de la Grèce s’est formellement soumis à l’Angleterre <dont elle a recherché la protection> sous les mêmes conditions que les isles Ioniennes. Cette nouvelle est parvenue à notre Ministère qui tâche encore de la cacher à cause de son influence sur notre horizon politique. Mais malgré ses précautions des lettres particulières ont cependant échappé à l’attention des postes et à la vigilance de la Police. Avant la soumission sous le gouvernement britannique il y a eu des conférences entre les chefs grecs et le commodore Hamilton qui commande la Station anglaise au Levant. Il est à remarquer que cet acte mémorable a eu lieu avant la levée (à présent très certaine) du siège de Missolonghi et de la défaite sur terre et sur mer que la Porte a soufferte devant cette place3.
La Quotidienne annonce également: Si l’on en doit croire les bruits répandus depuis hier, l’Angleterre a pris les Grecs sous son protectorat, et le gouvernement Anglo-Grec dans la Morée et l’Archipel aura la même forme que sur les Sept-Isles».
Quelque défiance qu’on puisse mettre dans des nouvelle de gazettes, celle-ci ne peut pas être censée controuvée; car si elle l’était le Ministère français l’eût d’abord annoncé et réfuté le faux