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Et nous allons dater cette épitre amicale
Des sommets fortunés de la Гора Katale.
Nous apposâmes tous notre signature à cette missive, et on se sépara bientôt. La grande-duchesse me ramena en ponney-chaise. Le reste de la compagnie rentra à pied. Le duc arrive après-demain et nos charades sont pour samedi.
Samedi 29 Juin. Aujourd’hui, jour de la Saint Pierre, nous avons eu la messe. Après le déjeuner, délibération chez nous. Fredro a admirablement lu des scènes de Molière. Puis, arrangements de nos costumes, avec m-lle Strandman. Ce n’est pas une petite affaire que d’improviser trois jolis costumes pompadour avec les éléments que nous avons à notre disposition. Nous dînâmes tous et Boris aussi chez la grande-duchesse. Après le dîner on se réunit dans une promenade en ligne. J’étais placée à côté de Fredro et sa conversation m’a surprise. Lui, si gai, si en train toujours, me parlait avec tristesse du poids des souvenirs, de l’amertume de la vie présente, dont on suit le cours au milieu des tombeaux de tant de personnes qui nous furent chères, lui parlait-on d’un autre côté, il ripostait vivement par une saillie remplie de verve pétillante, semblable à une fusée qui s’allume soudainement sur un ciel couvert de nuages. Cet esprit brillant, cette gaieté intarissable, ne sont-ils donc qu’un masque, au moyen duquel il dissimule la tristesse qui remplit son coeur? S’il en est ainsi, il est fort à plaindre. Nous prîmes le thé au palais. Boris, nous deux, Hélène et Jorry[344], nous étions assis á la table des fruits et du laitage. Boris se mit à parler de mes soi-disant dispositions poétiques, et malgré tous mes efforts récita le malheureux: „Heureux jour de mon âge“ qui fait mon tourment depuis l’âge de sept ans que je l’ai composé. Sacha amplifia et assura que je composais des vers jusqu’a présent, que j’en avais une masse. Hélène dit qu’elle le savait et elle et Jorry ajoutèrent qu’ils me les feraient réciter a la Кавалерская[345]. Par exemple! C’est bien compter sans leur hôte.
Dimanche 30 Juin, Fredro me persécuta pour que je lui dise mes vers. Je refusai carrément. Le duc est arrivé. La surprise aura lieu demain.
Mardi 2 Juillet. D’abord nous eûmes la répétition à 2 heures. On se rendit à la salle des Muses et Fredro commenca à nous grouper. La grande-duchesse représentant la peinture se tenait devant un chevalet. Hélène sculptait le buste de m-me Weymarn qui posait d’un air inspiré. Sacha et moi, nous étions en pose de menuet et le p[rin]ce Mestchersky avec sa pochette représentalt notre maître de danse. Dans un coin, m-r Jorry, Boris et Rumine, ayant l’air de déclamer devant un livre posaient pour la poésie. M-lle Harder, excellente pianiste et élève de Chopin, exécutait pendant la durée du tableau une pièce courte et brillante à laquelle devait succéder l’air du menuet de Don Juan[346] chanté par m-me Kochétof (Sokolof), son frére[347] et sa soeur[348]. En même temps les groupes s’animent et on danse un menuet à quatre paires. La grande-duchesse, qui le savait seule commença à nous l’apprendre. Les danseurs étaient: la grande-duchesse avec Jorry, le p[rin]ce Mestchersky avec m-me Weymarn, Boris et moi — Hélène avec Jean Rumine. A la fin du menuet on passa dans la chambre voisine transformée en un délicieux jardin au moyen d’une multitude de plantes de serre chaude posée sur une élévation simmulant une colline, et un Watteau langoureux rappellant le Décaméron de Boccace, et formé par les personnages de la première syllabe, viеnt у figurer le mois de Mai. — Le tout fut représenté par le Wallenstein’s lager, organisé sur les pelouses avoisinant le palais Chinois. Une tente fut dressée, des faisceaux d’armes, des soldats revêtus d’armures du moyen âge, des feux et une scène de la tragédie de Schiller[349], récitée par Jorry, Sokoloff et Numers. La seconde charade fut Ververt. D’abord une scène du Misanthrope[350] recitée par Fredro, le p[rin]ce Mestchersky et Jean Rumine, puis une scène de Zaïre[351] declamée par la grande-duchesse et maman devant le p[rin]ce Mestchersky, représentant Voltaire et le tout fut un tableau représentant la stupéfaction des Nonnes rassemblées autour de la cage de Ververt. C’est Numers qui représentait la mère Abbesse, et il m’avait emprunté ma jupe d’Amazone pour remplir ce rôle. Tout réussit à merveille, il у eut beaucoup de gaieté et la soirée fut charmante. A la fin des charades, la grande-duchesse organisa une ronde qu’on dansa autour de Fredro et à la fin de laquelle elle lui