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Daignez, Sire, lire ce mémoire en entier, quelque effet que son commencement puisse faire sur Vous <et jetez ensuite la vue sur les moyens dont on s’est servi, que Vous connaissez infiniment mieux que moi. Alors Vous ne croirez plus à la justice, à la sincérité de la politique européenne, phrases éternellement répétées chaque fois sous les formes qui sont à l’ordre du jour. L’intérêt particulier est la seule loi vraiment suivie, et tous les intérêts ont été favorisés depuis 1813, les Vôtres exceptés>.
J’ose courir le risque de Vous déplaire. Si je ne Vous aimais pas comme autrefois, je tiendrais coi dans mon cabinet de Physique. Que me fait l’Europe? Je n’ai jamais fait imprimer une page sur la Politique, quoique cela m’eût été si facile. Mais je penserai, je sentirai, j’écrirai pour Vous seul, jusqu’à mon dernier soupir. C’est l’existence de
Votre Parrot.
P. S.
Je parle de la Religion dans ce mémoire. Veuillez, Sire, Vous souvenir que dans le temps où l’on affichait l’athéisme j’étais chrétien, de cœur et publiquement, que lorsque la cagoterie et l’hypocrisie entoura <depuis 1814> Votre trône, je ne m’alliai pas à cet obscurantisme, et que dans les temps les plus récents, où la Mystique cessa de régner, je fis imprimer mon discours sur la Bible (dont Vous avez un exemplaire) prouvant par là combien peu je suis disposé à donner dans le sens opposé qui bientôt (conformément à la règle des extrêmes) mettra l’indifférence à l’ordre du jour1. <Mr. de Magnitzky est-il encore en place, ce fléau de la vraie Religion et de l’instruction publique de Votre Empire?>
La fille de Votre Sivers est de retour à Pétersbourg. Sire! Si Vous ne daignez pas la secourir promptement, <je puis en conscience Vous assurer> il est inévitable que le patrimoine de ses aïeuls ne soit séquestré et vendu et le nom de son digne Père, qui a toujours plus soigné <Vos intérêts> l’intérêt public que le sien, flétri.
Annexe
[Mémoire sur les affaires étrangères de la Russie]
Sire!
Vous avez élevé la Russie à un degré de puissance politique qui inquiète l’Europe et fait craindre l’Autriche, la Prusse et le Corps germanique pour leur existence. Vous avez en outre déployé des talents qui prouvent que Vous savez manier ce colosse de pouvoir. Cette alarme ne peut pas s’effacer par Votre modération personnelle, aucun État ne devant fonder sa sûreté sur les qualités morales de son voisin et la Politique travaillant pour l’avenir comme pour le présent. Il existe donc une ligue des grandes puissances contre Vous <précisément de celles qui se disent Vos alliés>; elle doit exister <quoiqu’elle ne se prononce pas>, et son but est et ne peut être autre chose que de Vous affaiblir. Mais quels sont ses moyens? La guerre sûrement pas. <On veut l’éviter parce qu’elle ne pourrait tourner qu’à l’avantage du géant qui n’aurait à combattre que des pygmées toujours mal unis dès qu’il s’agit de se battre.> C’est la Politique qui est chargée de cette œuvre <et le levier dont elle se sert consiste à Vous occuper à> qu’elle croit consommer en fixant Votre attention sur des négociations infructueuses qui Vous éloignent de Vos véritables intérêts et Vous font perdre cette popularité européenne qui en 1813 Vous avait fait l’idole de l’Europe. Jetez, Sire, les yeux sur les congrès qui dès lors ont eu lieu, celui de Vienne y compris, sur leur nombre, leur durée, les travaux qu’ils Vous ont occasionnés, les objets de délibération et leur tendance1. Et aujourd’hui l’on Vous invite encore à influencer les affaires de l’Amérique, Vous qui n’avez point de flotte qui commande sur les mers comme Vos armées commandent sur le continent tandis que Vous aurez l’Angleterre et les États-unis d’Amérique contre Vous. Mais il y a plus encore; tout ce qui a été fait et a déplu à l’Europe <à l’humanité> (excepté aux Cabinets) <tout l’odieux de ces négociations>, c’est sur Vous qu’on le rejette. C’est Vous, insinuent au public les auteurs soldés, qui avez outré le principe de la légitimité; c’est Vous qui avez fait soumettre Naples et la Sardaigne sans leur donner une constitution comme Vous l’avez donné à la Pologne; c’est Vous qui avez rétabli le roi d’Espagne, mais c’est le Duc d’Angoulême qui a arraché à ce roi cruel l’espèce d’amnistie qu’il a enfin donnée2. Vous êtes à l’extrémité de l’Europe; Vous n’avez pas d’auteurs qui aient voix dans le public européen; <on Vous conseille même d’éloigner cette publicité> on prohibe à l’étranger tout ce qu’on veut écrire pour ou contre la Russie, tandis que les autres puissances se servent des millions de leurs écrivains pour commander l’opinion. La postérité, <je l’espère> il est vrai, Vous vengera sûrement, si elle trouve les annales nécessaires; mais elle ne les trouvera pas; et en outre il s’agit du moment présent pour Vos intérêts présents.
<Mais, Sire, permettez-moi de Vous dire que Vous favorisez singulièrement les desseins des étrangers par Vos colonies militaries3. Elles épuisent pour le moment Vos moyens et, dès qu’elles seront consolidées, elles démembreront l’Empire, si non sous